Communiqué de la Ville de Liège en réaction à la carte blanche signée par Marcel Otte parue dans Le Vif/l’Express ce 11.11.18 : « Liège ou l’inversion des valeurs : la peur gagne contre la beauté »
Monsieur Marcel Otte, professeur ordinaire émérite de Préhistoire à l’Université de Liège, exprime dans Le Vif/l’Express son avis à propos des 11 peupliers centenaires alignés le long de la Dérivation.
Qu’il nous soit permis d’apporter ici les précisions suivantes.
Sensible au développement de lieux de détente et de loisirs ainsi qu’à la préservation de son patrimoine, la Ville a investi massivement ces dernières années afin de mettre en valeur le parc public de la Boverie – autrefois appelé Jardin d’acclimatation – qui fut créé dans la seconde moitié du XIX siècle ainsi que le Palais des Beaux-Arts construit à l’occasion de l’exposition universelle de 1905 et devenu le musé « La Boverie ». Ainsi, la Belle Liégeoise enjambe la Meuse pour relier la rive gauche directement au parc via un itinéraire cyclo-pédestre, la Tour Nicolas Schöffer a été réhabilitée et le remarquable espace paysager du parc fait l’objet d’une attention constante.
Depuis 2004, le Service communal de la Gestion forestière porte toute son attention à cet alignement exceptionnel, ces peupliers ayant subi des casses soudaines de grosses branches en période estivale entraînant un risque majeur pour la sécurité des usagers de ce parc public très fréquenté.
Plusieurs initiatives ont été prises :
- une première taille d’accompagnement a été réalisée en 2006 dans l’objectif d’accompagner ces arbres dans leur vieillissement et de les maintenir le plus longtemps possible ;
- des ruptures de branches réapparaissant en 2013, le Service de la Gestion forestière a réalisé une réduction de la couronne des arbres afin de pouvoir les maintenir dans des conditions de sécurité acceptables ;
- malgré ces interventions, de nouvelles ruptures sont intervenues en 2015, le service a donc supprimé intégralement certaines charpentières. Ce qui n’a pas empêché de nouvelles ruptures en 2016.
Force est de constater que ces initiatives ne suffisent pas à empêcher ces ruptures de branches. Depuis 2017, en cas de fortes chaleurs, un périmètre de sécurité déconseillant aux usagers du parc de se reposer au pied de ces arbres est mis en place. Un comble pour un parc si fréquenté à la belle saison.
Eu égard au caractère public du lieu, à la difficulté d’établir une clôture permanente efficace autour de l’alignement allant totalement à l’encontre du principe de jouissance de l’espace public par les citoyens, la Ville de Liège a pris ses responsabilités en faisant procéder à l’abattage de ces peupliers. Après toutes ces années de soins attentifs, leur remplacement s’imposait. La décision d’abattre un arbre n’est jamais prise de gaité de cœur, 14 Chênes des marais de 8 à 10 mètres de haut seront replantés dès le début 2019. Cette espèce est particulièrement adaptée aux berges et cet alignement devrait prendre la relève pour un siècle ou deux.
Il convient également de préciser ici que cet abattage a été autorisé par permis d’urbanisme délivré par le Fonctionnaire délégué de la Région wallonne après consultation et avis de :
- l’Agence Wallonne du Patrimoine (AWAP) ;
- la Commission Royale des Monuments Sites et Fouilles (C.R.M.S.F.) ;
- la DGO1 – Direction des Déplacements Doux et des Partenariats communaux ;
- la DGO3 – Département de la Nature et des Forêts ;
- la DGO2 – Voies Hydrauliques.
Seule la C.R.M.S.F. a remis un avis défavorable, doutant des ruptures de branches tout en préconisant d’établir une clôture permanente autour de l’alignement de peupliers.
Le permis a donc été délivré considérant notamment que « les actes et travaux envisagés trouvent leur fondement non seulement dans des impératifs sécuritaires, mais rencontrent par ailleurs la politique d’aménagement paysager souhaitée pour le parc ».
La responsabilité de base des édiles communaux et du service public est d’assurer la sécurité la plus élémentaire. Dans ce cas présent, il s’agit de la sécurité des usagers de ce parc public extrêmement fréquenté en période estivale et qui ne peut souffrir d’une inaccessibilité permanente. Monsieur Otte ne peut ignorer que de telles décisions sont prises sur base de recommandations de fonctionnaires compétents qu’il s’agisse d’ingénieurs forestiers, d’élagueur arboriste, du Département de la Nature et des Forêts, etc.
Par ailleurs, l’information a largement été partagée tant sur les réseaux sociaux que via un billet « Info travaux » distribué aux riverains et usagers du parc.
Le patrimoine n’est pas figé, il est vivant et évolutif. La notion même de patrimoine emporte les sensibilités personnelles et les époques où il est considéré. En ce sens, si on peut lire les mots du professeur Otte : « déforestation systématique », « hantise sécuritaire », « obsession de dégrader l’art de vivre », « pâles prétextes coutumiers », « mode terroriste », nous n’en sommes plus surpris mais attristés.
Car nous nous inscrivons dans une vision à long terme, notamment au niveau de la gestion forestière et des espaces verts (Liège est une des rares communes urbaines à disposer d’un Service de Gestion forestière et d’un ingénieur forestier) en replantant plus que le nombre d’arbres abattus tout en prenant en compte le caractère public et paysager du lieu ainsi que toute sa spécificité.
Notre patrimoine communal forestier compte plus de 22.000 arbres répertoriés. La Ville de Liège plante chaque année 350 nouveaux arbres. L’action plébiscitée dans le cadre de Réinventons Liège propose de doubler le nombre d’arbres plantés chaque année, ce qui sera déjà le cas cet hiver 2018/2019.