Présentation des statistiques de la criminalité 2012

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Mercredi 13 mars 2013


Mesdames, Messieurs,

C’est avec plaisir que je vous retrouve pour notre traditionnel rendez-vous de présentation des statistiques de criminalité sur le territoire de la Ville de Liège.Et c’est d’autant plus un plaisir qu’il s’agit de vous annoncer une diminution de la criminalité globale par rapport à l’année 2011 :
en effet, nous recensons 38.886 faits criminels, soit un recul de 7,1%.

Quelles sont les grandes tendances?
Les atteintes aux biens, qui représentent plus de la moitié des faits enregistrés en 2012, affichent une diminution (-9,7%), de même que les atteintes aux personnes (-11,6%), et que le groupe « criminalité sociale, économique et financière » (-12,6%).

En ce qui concerne les infractions aux règlements communaux, reflet de la répression via l'activité policière, cette catégorie poursuit sa progression à la hausse, avec une augmentation de 29,6%.

Il s'agit là de la conséquence assez logique de la mise en oeuvre, depuis plusieurs années, de la lutte contre les incivilités, réponse proactive apportée à l'une des préoccupations majeures des Liégeoises et des Liégeois.

Je laisse le soin à Christian Beaupère, dans quelques instants, de commenter ces chiffres dans le détail.

Toutefois, cette présentation me donne l’occasion de revenir sur un sujet que j’ai à plusieurs reprises abordé l’année dernière, et notamment lors de la publication de « palmarès » des villes les plus criminelles.

Dans notre démocratie, le débat sur la sécurité des citoyens est un enjeu fondamental. Il importe que ce débat puisse s’organiser sur des éléments objectifs.
En Belgique, le nombre de délits commis par an en est une grandeur objective.

Même si certains types de faits constatés relèvent de la proactivité policière, l’application de règles identiques d’enregistrement sur l’ensemble des zones de police garantit l’objectivité des chiffres obtenus.

Néanmoins, pour comparer l’état de la criminalité objective entre les zones, il est communément admis d’utiliser le ratio du nombre de délits d’une zone sur le nombre d’habitants de cette zone.
Il apparaît pourtant que ce ratio ne permet pas une comparaison objective de l’état de la criminalité entre les zones.
En effet, ce ratio ne porte que sur la domiciliation.
Pourtant, chaque citoyen souhaite pour lui et sa famille, non seulement être en sécurité chez lui, mais aussi sur le chemin du travail et/ou de l’école, à son lieu de travail, aux lieux où sont scolarisés les enfants, mais aussi aux lieux où il exerce ses activités de loisirs, où il va faire les courses, où il va se soigner,…

Fort logiquement, l’exigence citoyenne en matière de sécurité concerne tout le parcours quotidien de vie.

Par ailleurs, l’évolution de la mobilité démontre que les déplacements au quotidien sont de plus en plus nombreux (déplacements vers le lieu de travail, les écoles, les loisirs, ...).
Il n’est plus possible d’imaginer que les déplacements assurant les activités du parcours quotidien de vie du citoyen s’exercent en majorité dans la même zone.

Pour ceux qui commettent des délits, il en va de même. Ils ne sont pas seulement attirés par les valeurs détenues dans les habitations. Ils s’intéressent aussi aux biens détenus dans les commerces, dans les banques, dans les sacs à main, dans les portefeuilles, ....
Ces prédateurs sont donc attirés par toutes les activités présentes sur une zone donnée.

La comparaison de la criminalité organisée sur un ratio ne prenant en compte que la domiciliation est fondamentalement biaisée en ce qu’elle ne reflète pas du tout l’exigence citoyenne en matière de sécurité et la réalité des intentions des prédateurs.

Plus encore, l’utilisation de ce ratio à grand renfort médiatique stigmatise les zones de police concentrant le plus d’activités (commerces, bureaux, écoles, sports, culture, ...) au profit de zones de police essentiellement résidentielles où les activités sont proportionnellement peu nombreuses.

Les zones concentrant les activités sont dès lors considérées à mauvais titre comme étant beaucoup plus dangereuses pour leurs habitants.

A l’analyse des chiffres de la criminalité sur Liège, on se rend compte que l’utilisation de ce ratio, même à l’échelle de la zone, biaise la comparaison entre les quartiers concentrant l’activité et ceux à caractère plus résidentiels.

Ainsi, la zone du commissariat Wallonie centre connaît un ratio de 1373 faits pour 1000 habitants, les zones centrales (Centre, Longdoz, Avroy, Outremeuse, Guillemins), 314 faits pour 1000 habitants, c'est-à-dire que ces quartiers concentrent 58% des faits pour seulement 36% de la population.
Les autres quartiers plus résidentiels connaissent 128 faits pour 1000 habitants, soit 42% des faits pour 64% de la population.

Ceci démontre bien que l’activité présente sur une zone est un élément déterminant en matière de criminalité.
Il conviendrait dès lors de construire un nouveau ratio permettant des comparaisons plus objectives.

Pour certaines politiques publiques, la notion d’équivalent habitant ajoutée aux habitants proprement dit, a été utilisée.
Ainsi, en matière de taxe régionale « déchets » à charge des communes, la notion d’équivalent habitant (ratio volume de déchets par habitant) a été prise en compte pour ne pas pénaliser les communes touristiques de la Province du Luxembourg.

Pourquoi ne pas faire de même pour les zones concentrant l’activité ?
On pourrait dès lors imaginer, en matière d’analyse de la criminalité, utiliser cette notion.

Pourquoi ne pas ajouter au nombre d’habitants le nombre d’emplois et d’élèves présents sur la zone ?
Ces paramètres reflètent bien le parcours de vie du citoyen (habiter, étudier, travailler).
On peut, de plus, les déterminer officiellement.

Pour Liège, il faudrait ainsi ajouter aux quelques 200.000 habitants, plus de 100.000 postes d’emplois et plus de 90.000 élèves. Soit quasi le doublement du diviseur.
Une zone avec peu d’activités, peu d’écoles, … connaîtra un diviseur très proche du nombre d’habitants.

Je plaide donc pour une meilleure prise en compte des spécificités des villes, qui représentent l'ossature organisationnelle d'une région, d'un pays.

Elles concentrent tous éléments structurants (transports, emplois, culture, enseignement, centre de recherche, universités, médias,...) et retrouvent de l'attrait : facilités de vie en terme de : déplacements, frais du ménage, emplois, vie sociale,...

Les villes sont également pourvoyeuses d’emplois pour l’ensemble de leur agglomération.

C’est en effet dans les villes que l’activité économique est créée, que la densité favorise les échanges et stimule la créativité ! La prise en compte du phénomène urbain est donc essentielle !

Partout dans le monde, les villes sont reconnues pour leur rôle de moteur de développement grâce à leurs atouts (emplois diversifiés et durables, espace de mixité sociale et de rencontre, offre diversifiée de services). Mais elles sont également confrontées à une série de défis et problématiques spécifiques tels que la cohésion sociale (paupérisation, exclusion sociale), la sécurité, la mobilité, le logement, …

Il est temps d'avoir une meilleure prise en compte de la réalité urbaine.

Des réformes importantes, au niveau régional et fédéral, sont en cours et des transferts de compétence importants vont être réalisés. Je pense par exemple au financement des zones de secours, à la régionalisation de la politique des Grandes Villes, aux noyaux d’habitats,… Dans toutes ces réformes, il est essentiel de tenir compte des spécificités urbaines.

Car actuellement, dans les matières spécifiques qui nous occupent aujourd'hui, les difficultés ne manquent pas. Epinglons entre autres :

 l'augmentation des tâches administratives et judiciaires déléguées par le pouvoir fédéral vers le niveau local ;
 l'absence de continuité dans les politiques de prévention. Les plans de prévention sont à nouveau prolongés pour seulement 6 mois. Cette incertitude entraîne outre la démotivation du personnel, des projets figés et un manque de perspectives ;

 la politique de sanction qui repose de plus en plus, en terme financier, sur les villes. Ainsi, la politique de mesures judiciaires alternatives, dont les emplois sont financés par le fédéral mais dont tous les frais d'encadrement, de fonctionnement ou d'investissement sont à charge des communes. Pour Liège, cela représente près de 60.000€/an ! En matière de sanctions administratives, nous sommes confrontés à un manque de moyens humains pour appliquer la Loi, des difficultés en terme de formation et de responsabilisation d'agents civils,...

 la présence de plus en plus importante de clandestins, dont certains recourent à des pratiques délictueuses pour survivre, principalement en matière de toxicomanie.

Malgré toutes ces embûches, le citoyen attend que l'on remplisse nos missions au mieux de ses intérêts.

Cela devient impossible, si l'on n'envisage pas une concentration des moyens et une prise en compte des spécificités des villes pour assurer :

 le renforcement du personnel policier de terrain et l’allègement des tâches administratives accompagné d'engagement de personnel civil supplémentaire ;

 le maintien de la capacité d'investissement dans le budget des zones de police ;

 la constitution de Corps de sécurité pour certaines missions de surveillance (Palais de Justice,...).

Depuis 10 ans, nous avons, avec le Collège de Direction, injecté près de 30 millions € en investissements. La contribution de la Ville dans le budget de sa Police est augmentée au delà de la norme légale et nos policiers sont formés aux dernières techniques d'intervention.

Chacun, à son niveau de décision, doit désormais prendre ses responsabilités et soutenir l'action des autorités locales, si nous voulons conserver un esprit et une qualité de vie digne d'une métropole.

Je profite de votre présence pour remercier l’ensemble des 1100 agents de notre Police locale, pour la qualité de leur travail et le professionnalisme qu’ils mettent à exercer cette fonction de plus en plus exigeante.

Je cède maintenant la parole à Monsieur Beaupère.

Je vous remercie.

 

 

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