C’est toujours avec beaucoup d’émotion et cette année avec une émotion amplifiée que nous vous accueillons à l’Hôtel de Ville pour commémorer cette journée de souvenir. Journée des souvenirs qui prend des accents encore plus particuliers.
Rendre hommage à nos héros en compagnie des associations patriotiques et des jeunes, les enfants des écoles, particulièrement nombreux cette année dans un endroit qui a été il faut le dire avec reconnaissance extrêmement bien remis dans un état d’entretien, un état de fraicheur mais aussi avec le goût du sacré qui le caractérise. Ce moment, disais-je, constitue un instant privilégié aux fastes, à la douleur et au souvenir, on trouve l’espoir et de la reconnaissance.
2018 est une année particulière, l’armistice de la grande guerre sera, j’en suis convaincu, un moment particulier qui résonnera dans l’esprit de toutes celles et de tous ceux qui sont attachés à la notion de liberté.
Mais il faut le dire, 100 ans plus tard, nous vivons un moment particulier également où le monde n’est pas empreint de sérénité.
La guerre n’est pas à nos portes, et il faut s’en réjouir, mais elle est à la portée de nos téléphones, de nos smartphones, nos télévisons, où nous assistons aux opérations militaires et paramilitaires qui jettent sur les routes des millions de personnes en Syrie notamment.
Il m’est difficile aujourd’hui de ne pas avoir une pensée pour toutes ces victimes qui sont sur le chemin de l’exode et qui rejoignent en catastrophe les frontières. Comment ne pas faire un parallélisme avec les situations que nos populations ont vécu à deux reprises au moins ?
La guerre n’est pas à nos portes, mais nous sommes confrontés quotidiennement à celles et à ceux qui tentent de s’en préserver, de protéger leurs enfants et de rejoindre un monde sans bombe, sans balle, sans explosion.
La guerre n’est pas à nos portes mais ses conséquences sont dans nos villes, dans nos écoles, dans nos rues.
La guerre n’est pas à nos portes et pourtant notre ville s’est retrouvée, confrontée à une violence aveugle, il y a seulement quelques jours.
Nous étions très tôt ce matin, devant l’Hôtel de Police, devant un monument aux morts, morts assassinés en service commandé.
C’était pour nous le moment le devoir de mémoire pour la police.
Moment du devoir de mémoire pour Soraya, pour Cathy sans oublier le jeune Cyril et sans oublier non plus, parce qu’il s’agit de la même problématique de la violence, Amaury Delrez qui a été lâchement assassiné également il y a quelques jours à peine.
Nous avons été frappés, la Ville a été frappée, notre corps de police a été frappé, notre enseignement a été frappé. Au-delà de la peine légitime, présente, lancinante, pour les familles. Les interrogations pour les collègues, les agents de notre corps de police qui ont été blessés, leur famille également, que faut-il retenir ?
Il faut retenir que la formation est importante, parce que nous avons connu un drame. Sans la formation, nous aurions connu une catastrophe. La formation de nos forces de police, je pense au PAB, mais pas seulement car tout le monde s’est mobilisé : les forces de police ont engagé au sens large leur intégrité physique sans hésiter une seule seconde et je voudrais saisir l’occasion pour les remercier.
Je devrais aussi me réjouir de la formation dispensée par les services communaux, les services de prévention et les services policiers à l’ensemble des écoles présentes sur le territoire de la Ville, et on a pu voir combien cette initiative était pertinente.
Je voudrais assurer ici devant Madame la Députée provinciale en chef de l’enseignement que nos services sont disponibles pour prodiguer les enseignements non pas seulement à l’ensemble des écoles communales, mais à l’ensemble des écoles sur le territoire de la Province.
Mais il faut aller plus loin, Mesdames et Messieurs
Nous devons nous interroger sur les conditions qui sont réservés à celles et à ceux qui ont pour charge de faire respecter la norme. Au premier desquels nous avons le corps de police.
Comment faire en sorte, que les conditions qui leurs sont réservées leurs permettent d’être une police citoyenne, une police démocratique, une police qui n’est pas amenée soit à tourner la tête quand elle voit des faits délictueux, soit à tomber dans un excès d’autorité.
Je pense que nous avons des choses à faire et nous savons toutes et tous combien les forces qui se sont engagées depuis maintenant 3 ans ont travaillé au bénéfice de la collectivité et au péril de leur intégrité physique et en tout cas au péril de leur vie familiale, je pense que nous leurs devons le respect et je voudrais remercier ici au-delà de la police de la zone de Liège, toutes les zones de police parce que je sais que vous collaborez dans le cadre de la législation de la réforme des polices.
Je voudrais aussi remercier chaleureusement la police fédérale représentée par le Directeur Coordinateur et le Directeur Judiciaire, et je voudrais avoir des mots particuliers pour le 12e de ligne et toutes les forces armées qui se sont succédées sur le territoire de la Ville dans un modèle de coopération qui a été mis en évidence à la fois par les autorités civiles mais aussi par les autorités militaires. Nous avons trouvé la meilleure manière de collaborer. Colonel, merci.
Comment faire ? Il faut renforcer la prévention. On sait que la prévention est un élément important.
Il faut aussi investir et je voudrais remercier les membres du Conseil de Police qui sont présents, puisque nous n’avons pas hésité à prendre nos responsabilités au-delà des investissements dont Monsieur Beaupère parlera tout à l’heure dans des gestes tout à fait particuliers et dans l’urgence.
Je pense ici à la mesure prise en accord notamment avec le Commissaire Bailly pour la circulation et le contrôle du stationnement.
Le Conseil de Police a investi des moyens considérables pour, à la fois adapter le cadre strict des horodateurs en les modernisant, mais aussi en achetant deux scan cars qui vont pouvoir contrôler 10.000 véhicules par jour en exposant beaucoup moins les agents du Corps de Police à cet égard.
Je voudrais aussi dire que nous ne reculerons pas, et je le dis sans polémiques, devant les équipements nécessaires pour remplir la mission. Je pense ici notamment à l’équipement du peloton anti banditisme en ce compris, les véhicules nécessaires.
Deuxième élément, après la prévention et l’équipement : le statut. Je m’exprime ici devant plusieurs éminents parlementaires fédéraux.
J’ai lu attentivement, le Soir du 4 septembre 2018. Un article important intitulé « Après les drames, la colère sociale gronde dans la Police ».
De quel sujet parlons-nous ? Nous parlons de la réforme des instances disciplinaires, nous parlons des congés maladie, nous parlons du salaire, nous parlons de la pénurie d’effectifs où on donne un chiffre de 3.700 qui me semble important et nous parlons des pensions.
Il est clair que si nous voulons pour notre Police qui, plus que d’autres est exposée dans la société où nous vivons, des conditions de travail et un engagement sans faille, il faut régler ces problèmes. Parce qu’après 3 ans d’engagement avec des situations difficiles, des problèmes de nature sociale et syndicale ne doivent pas s’ajouter, faute de quoi, nous aurons des soucis collectivement.
Je voudrais également dire que dans la chaîne de la sécurité nous avons évidemment la Police fédérale. Il faut être attentifs, mais nous avons aussi la magistrature qui est touchée. Il faut alors réfléchir à tout cela, faute de quoi nous n’aurons pas le suivi que nous espérons et que la population espère.
Un dernier élément avant de conclure.
Je pense qu’il faut aussi un corps législatif adapté, faute de quoi, les policiers se trouvent dans une situation schizophrénique avec des lois et des règlements dont ils ont la charge et une situation sociale qui ne leur permet pas de le faire.
Je m’explique : je veux vous parler des drogues et je veux vous parler de la toxicomanie. Nous avons pu, avec le soutien de tout le corps social liégeois (les partis politiques, le tissu associatif, la magistrature, les Polices) ouvrir un dispositif de consommation dans une salle communale.
Ce n’est pas de gaieté de cœur, c’est une manière de reconnaître que nous avons un problème et de faire en sorte de ne pas le nier. Parce que nier un problème c’est l’inverse du fait de le régler.
Cette salle fonctionne avec toutes les garanties mais ce dispositif doit être amplifié. Il faut évidemment plus de prévention, j’en parlais tout à l’heure. Il faut aussi, pour les liégeois c’est facilement compréhensible, il faut aussi rouvrir un dispositif tel que Tadam. C’est-à-dire la distribution contrôlée de diacétinemorphine pour toutes celles et tous ceux qui acceptent de s’inscrire dans un processus de soins.
Mais il faut aussi de la répression parce que ce n’est pas parce qu’un phénomène est encadré que le trafic devient légal. Il faut la répression et à cet égard nous ne saurons rien faire sans la Police fédérale et sans la magistrature.
Et enfin, nous devons nous poser la question du cannabis. Le cannabis circule partout et quand je discute avec des agents de terrain, ceux-ci me disent : « Monsieur le Bourgmestre, on ne s’y retrouve pas. On ne s’y retrouve pas parce que d’un côté on nous demande d’être attentifs à la salle de consommation à moindre risque mais d’autre part on doit toujours être attentifs aux fumeurs de joints ».
Donc je crois que nous devons à nouveau ne pas nier un problème et en ce qui concerne le cannabis : nous devons organiser une régulation de sa consommation par les pouvoirs publics afin que notre population (particulièrement nos jeunes) ne soient pas obligés d’être en contact avec les circuits mafieux pour s’approvisionner.
De nouveau ça n’est pas être un propagandiste de la toxicomanie que de dire ça, mais nous devons être réalistes : il faut de la répression et à côté de cela beaucoup de prévention.
A cet égard je voudrais remercier toutes celles et tous ceux qui ont accepté de s’engager avec nous et je pense ici au Conseil zonal de sécurité qui joue un rôle particulier, qui rassemble le Procureur du Roi, qui rassemble la Police fédérale dans ses différentes composantes, la Police locale, la Ville sous l’autorité du Bourgmestre. Merci de votre collaboration et soyez assurés de la collaboration du Bourgmestre notamment en terme de Police administrative.
J’en arrive maintenant à la conclusion.
Mesdames et Messieurs, une civilisation est jugée à quelques repaires: à l’instruction et à la culture qu’elle prodigue, au sort qu’elle réserve aux plus faibles mais aussi à la manière dont elle traite et dont elle organise sa Police.
Je vais vous citer un auteur français qui a écrit un livre intéressant. Le livre s’appelle « De la Police en démocratie » et l’auteur s’appelle Sébastian ROCHE.
Il explique qu’à chaque fait de violence envers la Police on connait un mouvement de sympathie. La population remercie alors les policiers en rue, par écrit …Il dit que cela dure quelques semaines et qu’après la relation amour – haine entre la population et sa Police se réinstalle.
L’idéal que nous devons poursuivre et qui à Liège est certainement plus accessible qu’ailleurs, c’est d’avoir une harmonie et une conciliation entre la population et sa Police.
C’est le cas, je pense, et ça doit le rester. Cela nécessite de la Police de gros efforts, je le sais, mais ça nécessite également, de la part de la population, un respect pour celles et ceux qui sont démocratiquement chargés de faire respecter nos lois et nos règlements démocratiquement adoptés.
Soyez certaines et certains, Mesdames et Messieurs, que le Conseil de Police et le Collège de Police et le Bourgmestre y veillent et quel que soit le sort des urnes, je l’espère, continueront à y veiller.
Je vous remercie pour votre attention.